Quel sens et quelle pérennité accorder aux produits de l'artisanat "équitable" ? Partant souvent de bonnes volontés, ils mettent parfois, comme nous pouvons parfois le constater, des populations dans de faux espoirs : nos goûts changent, les modes passent, etc. Cela est notamment vrai dans le domaine de l'artisanat pour lequel il n'y a pas de contrôles, indépendants, seulement de belles photos de natifs souriants, des promesses, de belles chartes, etc.
C. Jacquiau, dans un article du Monde diplomatique de septembre 2007, fait la même remarque concernant le commerce pourtant "labellisé" du café équitable :
En l’état actuel, aucun label, aucune réglementation n’apportent de garanties officielles aux consommateurs d’équitable, qui doivent s’en remettre à la confiance qu’ils placent dans les acteurs du secteur. Le terme « label » ne peut en effet être utilisé qu’à la condition de répondre à une triple exigence : disposer d’un cahier des charges soumis à des contrôles indépendants, certifiés par un organisme lui-même indépendant et agréé par les pouvoirs publics.
Voici un extrait de mon livre sur l'enjeu du commerce des graines pour les populations :
Va-t-on un jour se procurer des graines et des bijoux végétaux au supermarché ? Quels sont les enjeux de cette mondialisation ?
On voit sur les marchés des villes tropicales diverses personnes qui vendent des bijoux réalisés avec des graines pour essayer de gagner quelques sous. Suite à l'enthousiasme occidental pour les produits issus du commerce équitable, certains de ces produits arrivent sur nos étals, étiquetés « équitables », « éthiques » ou « solidaires ».
Il faut savoir qu’à l’heure actuelle, aucune structure de contrôle indépendante n’a été mise en place, en particulier en ce qui concerne les bijoux végétaux fabriqués à l’étranger. Les contrôles sont volontaires et même lorsque les structures font preuves de bonne foi, rien ou presque ne nous permet de tracer les origines des produits. La plupart de ces bijoux « tendance » vendus en Europe sont fabriqués à grande échelle dans les banlieues des grandes métropoles, généralement pour des salaires indécents. Cela fera certes vivre des familles dans le besoin, mais ne correspond que rarement à l’image que nous nous faisons d’un commerce « équitable ».
À l’origine symboles et fierté pour de nombreuses ethnies, ces bijoux végétaux sont en passe d’être banalisés, de perdre leur sens originel. Les tribus qui les produisent à la base de l’échelle sociale sont trop souvent condamnées à fournir une main-d'œuvre bon marché. Sous le prétexte hypocrite de leur rendre leur dignité, nous profitons en fait de ces êtres humains qui avaient si bien compris la diversité de la nature et son importance, comme nous pourrons le voir. Rien d’autre que la simple variante d’une longue tradition coloniale : conquérir, acculturer, exploiter...
Mon souhait le plus cher serait que les organisateurs de salons "naturels" ou "biologiques "fassent que ces endroits deviennent des lieux de réflexion, de prise de conscience et non de consommation hypocrite.